Ƨɒvɘz-vouƨ liɿɘ ?
Vous avez eu du mal à lire le titre de cet article (savez-vous lire ?) ? Sachez que vous venez d’être plongé dans la peau d’une personne qui ne sait pas lire. Vous avez dû vous concentrer pour déchiffrer le texte, n’est-ce pas ? Elle aussi. Ce qui fait qu’elle ne peut se concentrer en même temps sur sa signification, ce qui complique encore la tâche. « Bon, ça concerne qu’une partie résiduelle de la société alors pourquoi en parler ? »
Vous pensez vraiment ça ? Manqué ! En Suisse, une personne sur cinq rencontre des problèmes pour lire ou pour écrire. Cela représente plus de 1.5 million d’habitants. « Oui, mais une majorité d’étrangers. » Encore loupé ! Cinquante pour cent de ces personnes sont des Suisses. Oui, l’ampleur de la situation est difficile à croire et à admettre. Vous revoilà dans la peau d’un individu confronté à la gymnastique de l’alphabet français qui préfère souvent sauver les apparences au lieu d’agir.
Les stratégies d’évitement : à éviter !
« Beaucoup développent des stratégies d’évitement pour invisibiliser le ‹ problème › aux yeux des autres. Mais ce n’est pas une solution viable. Tôt ou tard, la personne sera confrontée à une situation qui la mettra devant le fait accompli », expose Fabienne Robert-Nicoud. La Vallonnière était au CORA, mardi, pour présenter l’association Lire et Écrire dont elle est la présidente de la section neuchâteloise. Celle-ci propose des cours de lecture et d’écriture (qui n’ont rien à voir avec ceux de l’école standard) avec un suivi individualisé pour celles et ceux qui veulent s’en sortir, adultes compris évidemment. Voilà comment on s’en sort, avec de l’aide !
J’étais le roi du subterfuge
« Le plus difficile est de faire le premier pas », témoigne Roland qui a été confronté à cet obstacle et qui l’a surmonté grâce à l’association. « Mon déclic a été l’arrivée de mes enfants. Je voulais pouvoir les épauler au mieux dans leur vie. » Son
comparse Amarjit a longtemps refusé de prendre les choses en main : « J’étais le roi du subterfuge. Je disais que je n’avais pas mes lunettes pour qu’on m’aide à lire quelque chose. Et pour ne pas écrire, le coup du ‹ je n’ai pas une belle écriture › fonctionnait plutôt bien », sourit-il aujourd’hui. Souvent, c’est aux proches qu’il convient de tirer la sonnette d’alarme et de les guider vers des solutions. Alors si vous avez un membre de votre entourage qui en souffre, parlez-lui de cet article (puisqu’il ne pourra pas le lire par lui-même) ou, mieux, contactez Lire et Écrire au 032 914 10 81 ou à neuchatel@lire-et-ecrire.ch.
Kevin Vaucher