Depuis que ce tournoi a été imaginé et créé pour honorer la mémoire de Pierre Kobler une année après sa mort, sa sœur Janine et son mari nʼont jamais manqué une seule édition. Ce nʼest pas un pèlerinage annuel mais plutôt une façon de lui dire : « Pierre, on ne tʼoublie pas ».

Comment oublier ?

Comment pourrait-on oublier ce soir de 1977 et ce match de ligue nationale B contre Lausanne durant lequel le capitaine du CP Fleurier Pierre Kobler a rendu son dernier souffle ? Comment oublier ces images terribles dʼun homme qui tombe et ne se relève pas ? Comment oublier ces images de lʼentraîneur lausannois Réal Vincent bondissant sur la glace pour tenter de le réanimer, en vain ? Pour certains, le mieux est parfois de ne pas oublier mais de vivre avec. Cʼest le cas de Janine et de son mari qui étaient présents ce soir-là et qui font avec ces images de la scène quʼils ont vue de leurs propres yeux.

Le choc des émotions

Belle, farceuse et capricieuse, la vie est aussi de temps en temps brutale.

Cela sʼest passé dans le coin de la patinoire qui se trouve devant lʼactuel vestiaire de la première équipe du club. Je ne peux pas lʼoublier. En plus, jʼétais enceinte de ma fille à ce moment-là. Autant vous dire que cela a été difficile à vivre.

Le choc des émotions ! Pierre avait un frère et deux sœurs, autant de personnes qui ont dû apprendre à vivre avec ce lien et ce repère en moins.

Tout a été mis en œuvre pour le ramener à la vie, avec les moyens de lʼépoque bien sûr. Lʼambulance est rapidement arrivée sur la glace et il a été transporté à lʼhôpital de Fleurier (ça marque son époque).

Un coéquipier ambulancier

Même si les arrêts cardiaques en plein effort étaient moins fréquents quʼaujourdʼhui – ou en tout cas moins médiatisés – tous ceux qui ont assisté à lʼaccident ont rapidement compris la gravité de lʼinstant.

Son coéquipier Bernard Tschanz était ambulancier et il a immédiatement retiré ses patins pour aller chercher le véhicule de secours.

Dans la panique, personne nʼa vraiment eu le temps de comprendre ce quʼil se passait. Cʼest seulement lorsque la famille sʼest rendue à lʼhôpital que la réalité lui a éclaté au visage. Et ce fut violent, très violent !

Lʼespoir puis lʼannonce

Le personnel médical nous a dit que cʼétait trop tard, quʼil nʼavait rien pu faire. Comme le massage cardiaque avait été fait immédiatement et que lʼintervention avait été rapide, on avait encore espoir quʼil puisse être sauvé. Et puis… non, Pierre était bien mort.

Crue et cruelle, la réalité était celle-ci et il fallait désormais apprendre à vivre avec. Ces tristes images, la patinoire de Fleurier en était bien loin samedi. Et, ne serait-ce quʼen cela, ce tournoi est dʼune utilité indiscutable. Vivre, sʼamuser et prendre du plaisir en jouant au hockey est probablement le plus bel hommage qui pouvait être rendu par le club au joueur disparu.

Le CP a été exemplaire

Janine et son mari tiennent dʼailleurs à souligner le comportement exemplaire du CP Fleurier pour les accompagner dans leur douleur.

Les dirigeants et les joueurs de lʼépoque se sont approchés de la famille quelques mois plus tard pour nous demander si cela ne nous dérangeait pas quʼune compétition en son honneur soit organisée chaque année. On a particulièrement apprécié ce geste et on se fait un plaisir dʼy venir chaque année. Ils nous ont jamais lâchés,

relatent-t-ils avec reconnaissance.

Pour le meilleur et le pire

Le couple aime se remémorer dʼautres souvenirs sportifs joyeux avec les passionnés du puck qui composent les rangs des vétérans. Raison pour laquelle il joue les prolongations en participant au grand souper organisé en soirée pour clôturer chaque Mémorial.

Cʼest un moment plaisant. Aujourdʼhui, cʼest un peu dommage que les gens ne sʼintéressent pas un peu plus aux anciens du club. À lʼépoque, les spectateurs faisaient tous les déplacements dans des patinoires souvent pas couvertes. Il y avait un vrai engouement. On se rappelle avoir été trois fois de suite à Langenthal et le match avait été annulé les trois fois à cause des mauvaises conditions météo.

Le hockey, pour le meilleur (souvent) et le pire (parfois).

Kevin Vaucher