La Côte-aux-Fées
Au style unique, l’orgue du temple a 40 ans
Dimanche prochain, 7 mai, le temple de La Côte-aux-Fées accueillera un culte chanté et musical pour célébrer les 40 ans de l’orgue de l’édifice. Un instrument au style particulier, unique en Suisse romande à l’époque de son inauguration et qui a fait des émules.
Après les quarante ans de l’orgue du temple de Môtiers, il y a quelque mois, c’est au tour de celui de La Côte-aux-Fées de fêter son quarantième anniversaire. Le 6 février 1983, après deux années de construction, l’instrument du temple de La Côte-aux-Fées était inauguré. Néanmoins, ses premières tonalités, ses « cris de naissance », avaient déjà pu être entendus par quelques privilégiés. « Lorsqu’il fut construit, nous avions sonné les cloches et les habitants, ainsi que les ouvriers de l’usine Piaget, étaient venus écouter les premières notes », se remémore sans peine Jean-Samuel Bucher, organiste, ancien diacre et également ancien conseiller technique et musical de la commission des orgues de la commune.
Après la rénovation du temple niquelet, les autorités de la commune, la Paroisse réformée et l’Église évangélique libre ont l’idée de doter l’édifice de « quelque chose de vraiment beau », car jusqu’alors seul un harmonium électrique est présent, « un électronium » dans le jargon des organistes. C’est à ce moment que Jean-Samuel Bucher est invité à devenir le conseiller technique et musical, avec pour objectif de mener la construction d’un orgue digne de ce nom pour le temple. À l’époque, la mode est alors aux instruments de style français classique, mais l’organiste souhaite autre chose, un orgue de style nord-allemand, ce qui n’existe pas en Suisse romande. « Je voulais un orgue protestant, réformé, dans un temple protestant », avance Jean-Samuel Bucher, en ajoutant qu’il désirait « un son » différent « pour une musique et une liturgie réformée ».
« Lumineux et vivant »
Ce choix fait, les contacts sont pris avec un facteur d’orgues grison, Felsberg, près de Coire. L’organiste se rappelle même que quelques personnes de La Côte-aux-Fées avaient fait le déplacement de quatre ou cinq heures de voiture, en une journée, jusqu’aux Grisons, pour s’assurer du caractère artisanal de la construction. Le « ramage » de l’orgue exprime d’ailleurs les désirs des autorités, de la Paroisse réformée et de l’Église évangélique libre. « Pour être en accord avec l’environnement du lieu, le buffet est en sapin et les décorations représentent des gentianes et des chardons blancs », souligne Jean-Samuel Bucher. Un orgue dimensionné à son temple et qui, par son style nord-allemand, a fait des émules par la suite. En effet, il a désormais quelques « frères jumeaux » en Suisse romande, notamment à Saint-Légier. Sa particularité a aussi attiré quelques personnalités après sa construction. L’ancien organiste de la cathédrale de Lausanne, André Luy, ainsi que l’organiste de Notre-Dame de Paris sont venus le voir et l’entendre. « Un orgue dont on aimerait avoir la clé dans sa poche », selon le premier, et un instrument « lumineux et vivant », pour le second.
Des qualitatifs qui semblent éloignés de l’ascétisme de la morale luthérienne et du climat du nord de l’Europe. « Mais, c’est un orgue qui explose ! », avoue Jean-Samuel Bucher. « On le ressent non pas dans la tête, mais dans le ventre ». Comme s’il fallait, d’une certaine manière, dans l’ambiance relativement austère du protestantisme allemand, faire rejaillir la vigueur de la foi par la voix de l’instrument. Une « œuvre assez exceptionnelle », selon l’organiste de La Côte-aux-Fées, qui dit de cet orgue qu’il est véritablement « typé ». « Le facteur a marqué de sa bienveillance et de son amabilité cet instrument », note-t-il, en soulignant l’harmonisation faite par Jean-Marie Tricoteaux, « qui a la capacité de faire vivre les orgues ». Par évidence, l’instrument de La Côte-aux-Fées, par son caractère réformé et nord-allemand, se prête particulièrement aux œuvres allemandes, tels Bach, Pachelbel, Rinck ou Dreyer. Des compositeurs qui seront joués le 7 mai prochain à partir de 10 heures.
Gabriel Risold