Buttes livré en fleurs au quotidien
Depuis 2007, ils fleurissent le paysage et la vie du village de Buttes. Ils, ce sont la douzaine de tableaux pensés et réalisés par deux anciens postiers. Charles Henri Lambelet ‒ le penseur ‒ et Serge Gumy ‒ le peintre ‒ ont uni leurs efforts il y a bientôt quinze ans pour égayer et habiller les rues butteranes. Cette succession de peintures représente des paysages de la région sur la partie supérieure et des fleurs que l’on trouve à La Robella sur la partie inférieure. Le but était de créer un chemin didactique et « touristique » entre la gare et le bas du télésiège
Aujourd’hui, Charle Henri Lambelet a 88 ans. Le fondateur du Musée du Sel habite à Buttes depuis 1984, année durant laquelle il a repris le bureau de poste du village (jusqu’en 1994). Avant cela, en 1967, il avait succédé à son papa à la poste du Brouillet, près des Taillères. Lassé par la rude période hivernale et les tournées effectuées à ski ou à cheval (avec une glisse), il s’était décidé à s’établir dans le Val-de-Travers il y a 37 ans. Son comparse Serge Gumy (bientôt 80 ans) s’est quant à lui installé à Buttes en 2004 pour profiter de sa retraite. Cet ancien postier de Neuchâtel est un peintre au statut d’amateur mais au talent certain. Les deux hommes résident à quelques dizaines de mètres l’un de l’autre. Tout était donc réuni pour que le projet de ces tableaux voie le jour. Ne manquait plus que le déclic pour le mettre en route.
Chemin didactique à partir de la gare
L’élément déclencheur est venu d’un voyage en France de Charles Henri Lambelet.
Je suis allé à une fête folklorique à Mijoux, au pied du col de la Faucille. Des tableaux mettant en avant différents métiers en lien avec la vie du village étaient accrochés sur toutes les maisons. J’ai eu envie de reproduire cette idée originale dans les rues de Buttes mais je ne voulais pas recopier le thème des métiers. J’ai donc choisi de partir sur des tableaux numérotés avec ce que la nature nous offre dans la région.
Le peintre Serge Gumy est alors entré en action. Il a séparé en deux chaque tableau avec une moitié consacrée à des paysages et une autre dédiée à un style d’herbier photographique.
En plus d’être esthétiquement agréables, ces réalisations ont un côté ludique et « informatif » pour les touristes qui découvrent peut-être certains paysages du coin. En même temps, ils peuvent se prendre au jeu et tenter de chercher les différentes fleurs au gré de leurs balades. Puisque l’objectif était de relier la gare au bas de La Robella, une bonne partie des œuvres ont été affichées à la rue du Ruisseau. En avril 2007, le Conseil communal de Buttes donnait son autorisation à leur mise en place et dix pièces ont donc été accrochées sur les maisons concernées. Puis d’autres habitants ont souhaité se joindre au mouvement, ainsi d’autres tableaux sont visibles ailleurs que sur l’axe privilégié à la base.
Quand l’herboristerie mène à la révolution
C’est le cas le long de la Vy Saulnier où feu Heinz Reber a souhaité garnir l’un des murs extérieurs de sa bâtisse par exemple. Le Butteran était un féru d’herboristerie dans les dernières années de sa vie. D’ailleurs, le village a un rapport un peu particulier avec les plantes. à l’époque, Henri Constant Dubois en récoltait déjà pour les sécher et les vendre ainsi que pour en faire de la tisane. C’est lui qui emmena une trentaine de gaillards à Neuchâtel le 12 septembre 1831 pour défier le roi de Prusse. Une manœuvre révolutionnaire aussitôt matée par l’envoi de canons et de 200 royalistes pour encercler Buttes et désarmer ses habitants. Si les peintures épinglées en 2007 ont apporté une mini-révolution décorative, rien de comparable évidemment.
Le dernier tableau mis en place cette année
Dans ce cas, les plantes ont plutôt une vertu apaisante pour le regard et l’esprit. Devant le bon accueil réservé à ses œuvres, Serge Gumy a été sollicité plusieurs fois depuis cette date.
Je me rappelle effectivement avoir peint celui pour la famille Reber. Plus récemment, j’ai réalisé une peinture du Chasseron qui est visible sur la maison orange de la rue Derrière-Ville-en-Vent. Il est difficile de savoir combien de tableaux sont encore affichés aujourd’hui mais je dirais qu’il y en a une douzaine.
Ceux-ci sont d’ailleurs dans des états de conservation relativement fluctuant en fonction de leur exposition plus ou moins marquée aux intempéries.
J’ai répandu une bonne couche de protection mais ce n’est pas un produit miracle face au temps. En règle générale, ceux qui sont dirigés en direction de Fleurier ont plus souffert que les autres. Et pour certains, on dirait même qu’on les a pendus hier.
Une chose est sûre, aucune des créations n’a fané en près de quinze ans !