Sur les traces des trésors cachés du Val−de−Travers
Type de mission : mettre au jour les plans de Luc Floquet au FC Fleurier
Renseignement sur l’objectif : très peu d’éléments sur Luc Floquet circulent, il va falloir mener des interrogatoires
Localisation de l’objectif et date : Fleurier – Date : courant septembre 2023
Observations du terrain : c’est l’homme fort du club depuis huit ans, il est solidement ancré « au pouvoir ». Il a formé beaucoup de jeunes. Son « armée » de fidèles est donc vaste sur le secteur
Pendant que d’autres regardent uniquement demain, Luc Floquet voit l’horizon ! Il voit loin et il aime avoir le temps de construire un projet dans toute sa longueur. Ce sédentaire assumé a trouvé au FC Fleurier un cocon dans lequel il s’y sent bien. L’entraîneur de 57 ans aime la stabilité mais il sait aussi s’enflammer. Pendant un match, il vit chaque action et il vibre sur chaque ballon de ceux qu’il aime appeler « ses petits ». Protecteur et rassembleur, il garde toutefois toujours cette sérénité que seuls « ceux qui ont vécu » savent préserver en toutes circonstances. C’est un guide qui ouvre le chemin à ceux qui veulent bien le suivre. Floquet, le vertueux, place les valeurs au-dessus de tout le reste. Fiable, il fait partie de ces rares hommes à qui on vient taper sur l’épaule car on sait qu’on sera compris et écouté.
Le système Floquet : « L’indulgence passe avant la performance »
Si l’on vient taper sur l’épaule de Luc Floquet, c’est aussi que l’on sait que le travail sera bien fait. Il aime prendre son temps, certes, mais il va au bout des choses. Son équipe de 3e ligue a un fonctionnement qui lui est propre et qu’on ne trouvera vraisemblablement nulle part ailleurs. « L’indulgence passe avant la performance avec moi. Cela signifie que la progression individuelle de nos joueurs est plus importante que nos résultats », tranche-t-il. S’il utilise le pronom « nos », c’est qu’il englobe son staff dans ses propos. Son adjoint Johann Sancey et l’entraîneur des gardiens Alix Erb. Voilà pour son côté rassembleur. Ce ne sont pas des paroles en l’air. Cette saison, le trio a déjà « sacrifié des points » en faisant sortir des titulaires pour faire entrer de très jeunes joueurs en fin de match. « Il ne faut pas regarder les conséquences immédiates de cette façon de faire mais ce que cela va apporter pour l’équipe dans 6 mois, dans 1 an ou dans deux ans. À chaque fois qu’un jeune progresse, c’est le potentiel de l’équipe qui augmente. Aujourd’hui, j’estime que l’équipe joue à 40% de son plein potentiel. » Cela ne signifie pas que l’équipe ne se bat pas assez mais que chacun a encore une belle marge pour progresser.
Aucun objectif collectif mais une liste d’objectifs personnels à remplir
Dans le système Floquet, aucun objectif collectif n’est fixé en début de saison mais chaque joueur est appelé à remplir une fiche d’objectifs personnalisés. « Une fois que c’est fait, c’est à nous, le staff, de porter les joueurs vers l’accomplissement de leurs objectifs. » On ne parle pas de vouloir marquer trente buts par saison ou de vouloir jouer tous les matches, non ! Mais de choses très concrètes qui feront d’eux des meilleurs joueurs. « Cela peut être d’être plus calme sur le terrain, de davantage soutenir ses coéquipiers ou d’être plus présent sur le travail défensif par exemple. » La difficulté principale est d’emmener en même temps la vingtaine d’équipiers de l’effectif vers la réussite de leur programme d’amélioration. Résultat de ce management ? Les sportifs fleurisans s’investissent à fond et relèvent les manches aussi bien sur le terrain qu’en dehors. « Ils ont tous participé à la recherche de sponsors, en allant eux-mêmes sonner aux portes des entreprises du Val-de-Travers. C’est aussi grâce à eux si on a autant de soutien. » Et le public suit ! « Il est génial ce public car il est vraiment dans le même état d’esprit positif que nous. C’est vraiment beau ! ».
Son rôle d’espion chez les juniors
Si l’on remonte à plus loin, le FC Fleurier n’a pas toujours été ce club-là. D’après nos recherches, il a aussi travaillé différemment, en recrutant des « top joueurs » français pour viser un plus haut niveau. « Je ne renie pas du tout le passé et ce qui a été fait. Au contraire, je pense que c’était aussi sympa de voir évoluer des joueurs avec les capacités de 1re ligue promotion (3e division suisse) sur le terrain des Sugits. » C’était juste différent. Le club évoluait alors en 2e ligue. « Pour nous, c’était plus simple d’aller chercher de bons joueurs plutôt que d’avoir le courage de faire le choix de les former. Et moi, avec mon âme de formateur, je me sens beaucoup plus légitime en ma qualité d’entraîneur maintenant. Nos petits s’investissent énormément et ils méritent leurs chances. J’aime les faire grandir », livre celui qui arrive toujours avec deux heures d’avance au stade pour pouvoir jeter un œil, l’air de rien, à l’entraînement des juniors. « J’adore faire ça, ça se voit non ? », claque-t-il enfin en rigolant. Mission réussie, nous savons tout des « petits papiers » de Luc Floquet ! Je rentre au Courrier. Cet article s’autodétruira dans quelques semaines, quelques mois ou quelques années. Tout dépend dans quelles mains il tombera.
La Question à ne pas poser
Après huit ans à la tête du FC Fleurier, que faites-vous encore ici ?
’est une question que l’on me demande assez régulièrement. Pourquoi je reste à Fleurier, dans un club loin de tout, alors que je pourrais exercer à un niveau supérieur. Ma réponse est toujours la même. Je reste car c’est un amour parfait ! Qui peut se targuer de n’avoir eu aucune dispute sérieuse avec sa fiancée en huit ans de vie commune ? Moi je peux le dire avec le FC Fleurier. Je ne vais pas mentir, je suis courtisé à chaque fin de saison par d’autres équipes (qui évoluent jusqu’à trois niveaux en dessus de Fleurier, d’après nos informations) mais je ne vais pas changer pour changer. Ici, j’ai la chance de pouvoir construire sur du long terme, en faisant progresser des jeunes de la région. Je ne vois pas l’intérêt de partir ailleurs où on ne me laissera rien bâtir sur plus d’un ou deux ans.
Son passé de gardien et son emploi dans une usine d’injection plastique
Si vous avez l’occasion de parler avec lui, vous allez sans doute déceler rapidement que Luc Floquet est Français. Son accent aurait du mal à dire le contraire. « Je viens des Ardennes. J’ai vécu en France puis je suis parti en Belgique pour jouer au foot. » En effet, avant de s’asseoir sur le banc de touche, l’homme a vécu une courte carrière en tant que gardien de but. Il a joué jusqu’à un niveau équivalent à la 3e division suisse. « J’ai fait la transition à 32 ans en dirigeant d’abord les juniors. Puis je me suis occupé d’équipes d’adultes. » On trouve des traces de son passage à Luxeuil-les-Bains et à Pontarlier notamment. C’est justement après ces 5 années vécues à Pontarlier qu’il a accepté de venir coacher le FC Fleurier qui reste l’unique club suisse avec lequel il a collaboré. Le terme de collaboration est volontairement choisi car l’homme de 57 ans n’est pas entraîneur à temps plein. L’émolument qu’il reçoit à la tête d’un club de 3e ligue ne lui permet pas de boucler son budget personnel. Il travaille donc à 100% en parallèle du foot. « Je suis employé dans une usine d’injection plastique à Vallorbe. Cela fait 13 ans que j’occupe ce poste. » Une nouvelle preuve de plus que ce sédentaire aime les missions au long cours. La fidélité a du bon, Luc Floquet méritait largement sa place dans mes « petits papiers » à moi, à savoir mon carnet de missions. « D’ailleurs, découvrir le reportage de match du Courrier fait partie intégrante du planning de ma semaine. C’est toujours bien tourné, juste et pertinent, sans être blessant pour les joueurs. Alors merci le Courrier ! ».
Cela fait 8 ans que le terrain des Sugits est la seconde maison de Luc Floquet
Assis ou debout en bord de terrain, le coach veille toujours à soutenir ses « petits ».