Cercle scolaire du Val-de-Travers
Partager un repas pour comprendre l’autre
Jeudi dernier, trois classes de 2e année de l’École Jean-Jacques Rousseau ont vécu une matinée particulière lors de la semaine d’actions contre le racisme. Après avoir reçu Mary Wenker, auteure d’un livre narrant l’histoire d’un jeune réfugié afghan, les élèves ont dégusté un repas préparé par des mineurs non accompagnés du centre d’accueil de Couvet.
Pour comprendre l’autre, il faut certainement savoir l’écouter et aller à sa rencontre. Telle pourrait être la morale de la journée vécue par trois classes de 2e année du Cercle scolaire du Val-de-Travers, jeudi dernier, au collège du Temple à Fleurier. Dans le cadre de la semaine d’actions contre le racisme, l’association Génie-citoyen et le Service de la cohésion multiculturelle du canton de Neuchâtel (COSM) ont proposé aux élèves un programme spécial avec, d’abord, une histoire, suivie par une rencontre et un repas avec de jeunes Afghans mineurs non accompagnés résidant au centre d’accueil de Couvet. L’histoire, c’est celle d’Hasan narrée par Mary Wenker dans son livre « Hasan venu d’ailleurs ».
Jeune Afghan hazara, minorité ethnique discriminée, Hasan est contraint de quitter son pays en raison de la guerre. Après avoir été séparé de sa famille, il entreprend le périple de l’exil jusqu’à un camp au sud de l’Europe, avant de pouvoir rejoindre la Suisse. « C’est une histoire vraie, une histoire que l’on ne voit pas sur les écrans », explique aux élèves Mary Wenker, ajoutant uniquement que dans la réalité Hasan porte un autre nom. L’auteure a fondé une ONG, Choosehumanity, active dans un camp en Grèce. C’est là-bas qu’elle a fait la connaissance d’une famille afghane séparée de son fils de onze ans qui, lui, avait déjà rejoint la Suisse. Avec l’aide de l’ONG, aujourd’hui cette famille est réunie et vit dans le canton de Berne. « C’est parce que j’ai rencontré cette famille que j’ai voulu raconter l’histoire d’Hasan », indique l’auteure.
Menu à la mode afghane
Durant sa lecture, avec l’aide d’images dessinées, Mary Wenker a questionné régulièrement les élèves. « C’est quoi le racisme ? C’est quoi un réfugié ? », a-t-elle demandé. « C’est quand on est méchant », répond une fille. « C’est quelqu’un qui quitte son pays pour s’abriter », avance un garçon.
L’auteure a résumé que le racisme était de se moquer et de réprimer l’autre en raison de la différence. « Hasan il est différent et on ne le comprend pas bien. Mais pour le comprendre, il faut écouter ce que son cœur nous dit », a expliqué Mary Wenker. Progressivement, chaque élève a remarqué que l’on pouvait apprendre des différences des autres. « Comment on se sent quand on aide quelqu’un ? », a demandé l’auteure. Comme une évidence, le jeune public a répondu : « content ».
Après avoir écouté l’histoire d’Hasan, les élèves ont rencontré des jeunes mineurs non accompagnés au parcours similaire. Dans la cour, les huit jeunes Afghans du centre d’accueil de Couvet, accompagnés par leur professeur Dawood Rezai, se sont présentés aux enfants qui les ont applaudis pour le repas qu’ils avaient cuisiné. « Des plats un peu comme en Afghanistan », a indiqué Dawood Rezai, Afghan lui aussi, et arrivé en 2015.
Au menu, du riz au safran et à la cardamome, du poulet aux épices, de la salade et du pain afghan fait maison. « C’est une occasion un peu unique d’aller rencontrer la population, mais c’est génial de partager cela avec des enfants », a-t-il estimé. Le professeur à la structure Espace à Neuchâtel et La Chaux-de-Fonds précise que parmi ses élèves réfugiés certains sont en Suisse depuis un mois ou moins.
Moment de partage
Sur le sol de la cour, les élèves ont dégusté ce menu un peu comme en Afghanistan, soit assis sur des couvertures. Lorsque l’on demande si c’est bon, la grande majorité des enfants lève avec vigueur le pouce. « Super bon ! Surtout le pain », s’est exclamé un élève. « Le poulet est très bon, mais je n’ai pas aimé les oignons », note une autre. Il faut dire que le plat était garni d’oignons rouges crus. « Tous les élèves ont eu des oignons ce qui était un peu audacieux », sourit Marianne Fluck Félix, une des enseignantes.
Quoi qu’il en soit, le pain, soit des galettes mi-levées, et le poulet ont rencontré le succès auprès des jeunes gastronomes.
Au fil des minutes, les jeunes réfugiés ont dépassé leur timidité et ont même pris place à côté des élèves pour savourer le repas qu’ils avaient cuisiné. Si la barrière de la langue était toujours là, celle des sourires et du langage des mains n’existait pas. « Ce moment de partage est important», a souligné Dawood Rezai, heureux de l’événement. Ne dit-on pas que la table a toujours su réunir les êtres humains ?
Gabriel Risold