Chaude ambiance sur la glace
C’est une tradition à laquelle tient particulièrement « l’homme de glace » de Noiraigue Marcel Jacot. Depuis 1958, il attend impatiemment que la température devienne négative pour faire naître une patinoire artificielle à la rue de l’Areuse. L’air polaire de ces derniers jours l’a donc particulièrement réjoui et les premiers coups de lame de l’année ont pu être donnés ce week-end.
« C’est la soixante-deuxième année que je fais de la glace », lance Marcel Jacot sur un ton qui fleure bon les souvenirs. C’est à l’âge de onze ans que l’enfant du Vallon a donc eu l’idée de créer une surface de glisse pour s’amuser avec ses copains. « Une façon intelligente de passer du temps dans la nature. Mais aujourd’hui, les jeunes préfèrent le plus souvent avoir le nez plongé dans leur smartphone », se marre-t-il dans un mélange d’incompréhension et de bienveillance. Car s’il se donne tant de peine à créer sa patinoire naturelle chaque hiver, c’est avant tout pour faire plaisir aux enfants du village.
Entre 15 et 20 personnes par jour
Et l’homme a une nouvelle fois été dépassé par le succès de « sa création » puisque c’est de tout le Val-de-Travers que les familles sont venues glisser samedi et dimanche. On s’est même laissé dire que certains avaient prolongé la récréation jusqu’au lundi. « Entre quinze et vingt personnes sont venues patiner chaque jour du week-end grâce au bouche-à-oreille », confirme-t-il. « La buvette a malheureusement dû rester fermée cette fois-ci en raison de la situation sanitaire », regrette quand même celui qui a joué durant quarante-deux ans au hockey sur glace dans l’équipe de Noiraigue (en deuxième et en troisième ligue).
Avant de « s’envoler » sur la surface de trente-cinq mètres de long et de vingt-deux mètres de large, les voltigeurs d’un jour sont passés par le vestiaire. Vestiaire où une limite de cinq personnes présentes simultanément avait été fixée. Ensuite, chacun a pu profiter du moment au maximum. De quoi récompenser tous les efforts de Marcel Jacot et de sa petite équipe de bénévoles. « Cela faisait plusieurs jours qu’on essayait de faire prendre la glace. La joie des familles est gratifiante. »
Vers des conditions peu favorables ?
Après quelques tentatives infructueuses, les forçats de la glace ont donné un gros coup… de patin décisif en fin de semaine. « Pour mettre toutes les chances de notre côté, on a ressorti la fraiseuse le vendredi précédent. On a minutieusement enlevé la neige et nettoyé du mieux possible la surface. Ensuite, il ne restait plus qu’à espérer que ça gèle et que ça prenne. Plus le sol est net, plus les chances de fonctionner sont grandes. » Captivant, chaque mot de « l’homme de glace » frisonne de savoir-faire et de passion.
Une fois que la glace s’est formée durant la nuit, tout n’est pas gagné pour autant. Le plus dur reste même à faire. « Le moment crucial intervient entre 11 heures et 15 heures où il faut que la température se maintienne sous le 0 degré. » Ce coup de chaud passé, les patineurs peuvent respirer… jusqu’au lendemain. Car oui, le retour annoncé de la neige et le réchauffement des températures ne parlent pas en faveur du maintien de la patinoire naturelle ces prochains jours. « Je ne peux pas être plus précis mais vous pouvez essayer de téléphoner au bon Dieu pour en savoir plus », balance-t-il un brin taquin. Allô Dieu, ici le Val-de-Travers, vous m’entendez ?
Kevin Vaucher