Disparition de Ben : Môtiers Art orphelin
L’artiste franco-suisse a été retrouvé sans vie, mercredi 5 juin dernier, dans son appartement de Nice. Ben avait pris part à six des huit expositions en plein air au Val-de-Travers.
Il avait exposé au MoMa à New York, au centre Pompidou à Paris… et à Môtiers Art en plein air. Ben est décédé mercredi 5 juin à l’âge de 88 ans à Nice. L’artiste était connu pour ses slogans rédigés en lettres manuscrites blanches sur fond noir.
Benjamin Vautier de son vrai nom « a été découvert sans vie à son domicile », selon le parquet de Nice. Les premiers éléments de l’enquête font état d’une plaie par arme à feu. Cette disparition a provoqué une avalanche de réactions. La ministre française de la culture, Rachida Dati, a évoqué un artiste de légende. Le Niçois possède une réputation internationale : en 1992, lors de l’exposition universelle de Séville, il provoque en écrivant « La Suisse n’existe pas ».
Ben : « Ah, mais c’est bien Môtiers. »
Ben avait également exposé dans la région et notamment à Môtiers Art en plein air. L’artiste franco-suisse avait d’ailleurs tissé des liens forts avec ces fondateurs, Marie et Pierre-André Delachaux. En 1995, il réalise l’affiche intitulée « Môtiers ne fait rien à moitié » et expose dans le village. « Ça s’est fait un peu comme ça. Puis après ça s’est enchaîné.
À chaque exposition, on lui proposait quelque chose. Il n’est jamais venu ici à Môtiers », raconte Pierre-André Delachaux. « Et chaque fois qu’on parlait avec lui, il nous disait ‹ ah, mais c’est bien Môtiers ›. Il imaginait le paysage, ses peintures sur des volets ou sur des bancs. Il nous a toujours dit qu’il était très content. » Marie Delachaux se souvient aussi des échanges avec le Niçois : « Quand on arrivait chez lui, un jour il nous a dit ‹ Bonjour Môtiers ! › Au téléphone aussi. »
Marie et Pierre-André Delachaux : « Pour lui, on était des gens un peu cinglés qui organisaient de grandes expos au bout du monde, et je crois que ça lui plaisait. On était en dehors du système, et Ben n’aimait pas trop le système non plus. »
« Je suis bien ici »
Ben s’attache donc à Môtiers en 1995 et revient exposer à chaque édition jusqu’en 2021. En 2003, il laisse sa trace sur certains bancs môtisans. En 2007, les volets d’une maison de la Grand-Rue sont signés « Ben ». En 2011, il partage cet attachement avec les visiteurs. Sur un des toits du village, il écrit « Je suis bien ici ». Retour de la provocation en 2015, avec une énorme toile dans un champ sur laquelle est inscrit « Fuck art ». C’est le plus grand Ben du monde. En 2021, il imagine le plus petit Ben du monde : des tampons à imprimer sur les mains des visiteurs.
Marie et Pierre-André Delachaux sont unanimes : Ben rassemblait. « Les enfants le reconnaissaient car ils le voyaient sur leurs carnets ou cartables », se rappelle Marie Delachaux. Et Pierre-André précise même, « Ben réunissait tout le monde parce qu’il avait fait pas mal d’expositions dans le monde entier. Il y avait toujours quelques œuvres dans la langue du pays où il exposait. »
RTN/aju-swe