Môtiers
Gros bol d’air pour l’art
Repoussé en raison de la pandémie, Art en plein air à Môtiers aura bel et bien lieu en 2021. Les cinquante artistes sont déjà en pleine création et le résultat vous sera proposé entre le 20 juin et le 20 septembre. Comme toujours, de grands noms sont attendus et de belles surprises sont au programme. Ben proposera par exemple d’offrir un petit cadeau à chaque visiteur.
En ces temps calmes et compliqués pour l’art et la culture, Art en plein air a décidé de rester debout face au virus et s’offre donc une huitième édition décalée de… deux ans. Comme un temps de repos de quatre ans est habituellement respecté entre deux expositions et que la septième mouture a eu lieu en 2015, la suivante aurait dû se faire en 2019.
Mais j’ai écrit un livre (Môtiers – Art en plein air, Trente ans : regards et anecdotes) ce qui a repoussé l’expo d’une année puis il y a eu la pandémie. Normalement, les artistes viennent au mois d’avril-mai pendant trois semaines et sont hébergés au chalet du ski-club en dessus de Môtiers. En 2020, nous ne pouvions pas regrouper autant de monde à cause du Covid et nous avons donc été obligés de repousser l’exposition. Cette fois-ci, nous pouvons accueillir les artistes dans une villa à Fleurier avec des chambres séparées. C’est ce qui nous permet d’y aller,
souffle l’emblématique président Pierre-André Delachaux.
Les artistes sélectionnés en 2019 déjà
Les œuvres étant exposées en plein air sur un espace suffisamment grand pour ne pas créer d’attroupement, le feu est au vert. Seul le vernissage est encore en danger alors que la buvette du Plat de Riaux devra peut-être subir quelques aménagements en fonction de la situation sanitaire.
Les artistes sélectionnés l’année passée par un jury composé de membres de la Commission fédérale d’art (plus haute « autorité » dans ce domaine en Suisse), de professionnels du métier et de notre comité ont évidemment été réinvités.
Ceux-ci ont effectué la traditionnelle visite du village en été 2019 déjà. C’est à ce moment-là que chaque point de passage du circuit est choisi.
Cela fait un bon moment que cette visite a eu lieu et certains ont décidé de changer de lieu voire même de création.
La palme revient à un « exposant » particulièrement indécis qui a déjà changé de projet à cinq reprises. C’est aussi lors de cette visite que l’aspect historique et culturel du Vallon leur est expliqué.
C’est comme ça que l’on se retrouve année après année avec des conceptions faisant références à Rousseau, à l’absinthe, à l’horlogerie ou à l’asphalte.
Des thèmes chers à la région et à cet ancien professeur de français et d’histoire. Comment le prof qu’il était en est-il venu à l’art, bonne question non ?
Remède contre la morosité des années 1980
J’ai toujours été passionné par l’art. Et lors d’un voyage dans la région de Chamonix, ma femme Marie et moi avons découvert un circuit d’œuvres magnifique au cœur des Alpes. Nous avons automatiquement eu envie de faire la même chose dans notre décor de Môtiers. Dans les années 1980, tout était en train de fermer dans le Val-de-Travers et le chômage augmentait. C’était terrible et on s’est dit, c’est le moment de mettre notre idée en action pour montrer que le Val-de-Travers ce n’est pas ça.
Voilà comment tout a commencé. Et tout a continué, tout, tout a continué : 1989, 1995, 2003, 2007, 2011, 2015 et 2021 !
Le budget d’Art en plein air est aujourd’hui d’un million de francs et il était au moins quatre fois inférieur au moment de son lancement en 1985. La raison est simple : les créations sont réalisées sur place et nécessitent un tas de moyens alors qu’elles étaient simplement amenées toutes prêtes dans le passé.
Comme les membres du comité, les artistes ne sont pas rémunérés mais nous les aidons à produire leur œuvre désormais. On paie parfois des ingénieurs, on fournit le matériel et on fait toujours appel à des entreprises de la région. Cette fois, un artiste se frotte à un grand travail de bois et il va directement le faire chez un menuisier du coin. Une autre va travailler avec des girouettes et elle va se les procurer chez Bagatella à Boveresse.
Les œuvres géantes ont la cote
Alors que le minimalisme tenait le haut de l’affiche ces dernières années, la tendance de cette édition est le « grand format ».
Il y aura notamment une pièce en marbre de cinq mètres de haut dans la Grand’Rue et une autre de six mètres à l’entrée de la grotte. Comme si les artistes avaient envie d’imposer leurs œuvres, de montrer qu’ils sont plus que jamais vivants.
Et l’engouement est énorme cette année ! Le téléphone du couple Delachaux n’arrête pas de sonner tant les artistes souhaitent s’exprimer et participer à la grande fête estivale. énormément de gens se renseignent déjà sur le maintien ou non de l’événement.
On sent qu’il y a un manque et que tout le monde s’impatiente de pouvoir à nouveau assouvir sa passion.
Ne dit-on pas que le doute et l’imprévu sont des sources d’inspiration phénoménales pour l’art ? La période actuelle a donc dû être particulièrement fructueuse et on s’en lèche les babines d’avance. Pierre-André Delachaux un peu moins, car une dizaine de créateurs ‒ tous de nationalité suisse ‒ habitent hors du territoire (Berlin, Munich, Amsterdam,…) et cela ne va pas sans lui donner quelques cheveux blancs.
En général, c’est déjà compliqué de faire venir leur matériel de l’étranger et ça l’est encore plus actuellement avec les problèmes de trajet entre pays. Mais j’en ai vu d’autres en huit éditions,
se rassure le Vallonnier de 75 ans. Paraît-il qu’il a même déjà vu des bouteilles d’absinthe explosées et des tables éjectées par la fenêtre. Donc oui, faites-lui confiance il en a vu d’autres.
Kevin Vaucher