Le diamant vert du Val-de-Travers 9/9
La réalité de cette incroyable histoire a donc été confirmée par la découverte du diamant vert. L’affaire a fait le tour des médias nationaux et a fait la « Une » de plusieurs flashs internationaux. Même la presse zurichoise, d’habitude si encline à critiquer le Val-de-Travers, s’est déplacée au Vallon pour faire des éditions spéciales en direct de Buttes. Cette affaire fascine autant qu’elle interroge. Tout le monde se demande maintenant où se cachent les membres du « Cercle », qui ils sont vraiment et comment comptent-ils s’y prendre pour mettre la main sur le diamant vert ?
Les réponses à ces questions vont peut-être venir de quelques bouts de papier. Depuis quelques jours, l’ombre du corbeau plane à nouveau sur le Vallon. Il a refait son apparition en déposant une étrange invitation dans différentes boîtes aux lettres vallonnières. « Toutes les vérités sont-elles bonnes à dire ? Comment briller dans un monde où seuls l’obscur et l’occulte intéressent ? Rejoignez le cul du vent, vendredi, à 19 heures et vous saurez tout ! » Le cul du vent prend une signification toute particulière ici. C’est l’ancien nom du Creux du Van et ça veut donc dire que le corbeau est un connaisseur de l’histoire de la région. Ciel l’est aussi : « Le cul du vent est une curiosité géologique. Sa falaise circulaire est haute de presque 200 mètres et longue de 1400 mètres au-dessus des gorges de l’Areuse. La réserve du Creux du Van s’étire sur 12 kilomètres. Tu t’en rends compte Kappa ? Pas vraiment ? Ben tu vas le voir de tes propres yeux car nous y serons vendredi, à 19 heures. »
La vérité s’affiche par avion, au-dessus du cirque rocheux
Et ils ne seront pas seuls. La nouvelle fait rapidement le tour des chaumières et le mot se passe de porte en porte. Le lendemain, un énorme dispositif policier est mis en place. Oui, les policiers sont aussi sur le coup. Le groupe d’intervention COUGAR est également prêt à surgir. Les agriculteurs de la région ont spontanément proposé leur aide. Sous la houlette de Frédy Bigler (ancien gérant du Landi de Môtiers) et de quelques autres, tous les chemins de fuite sont bloqués par des tracteurs et des bottes de paille. La famille Stähli a également mis à disposition plusieurs buffles, prêts à se charger des malfrats s’ils venaient à prendre la fuite à travers champs. Bref, le Val-de-Travers s’est refermé sur lui-même et est devenu une vraie forteresse, de laquelle personne ne peut plus s’échapper. En cette fin d’année, la nuit est tombée dès 17 h et le cirque rocheux n’est plus qu’éclairé par la force des caméras et des projecteurs utilisés par les médias, qui ont eu vent de ce rendez-vous. Des centaines de personnes sont réunies dans le silence, dans l’attente excitante de l’inconnu et dans ce décor d’une intensité rare. « Là, un avion… », s’écrie Kappa ! « Il tire une banderole. C’est un message. » L’avion survole le Creux du Van avec ce message « Là où le calme rencontre l’intensité » ! C’est le slogan de la commune de Val-de-Travers. « Mais qu’est-ce que ça veut dire », entend-on dans la foule ! Tout à coup, des coups de feu !!! Non, ce ne sont pas des coups de feu. Des pétards ? Non plus ! Mais c’est quoi alors ? « Des feux d’artifice, regardez », s’émerveille Ciel.
Les cinq hommes de la Grande Table
Le flou est total et la cohue générale dans les rangs. Ce moment est aussi improbable qu’exceptionnel. Et puis, une grosse lumière jaillit de nulle part. D’énormes spots éclairent une grande table déposée sur un promontoire naturel. Cinq personnes y étaient assises dans l’ombre. Oui, il y a bien cinq personnes à la table. Est-ce la Grande Table du fameux Cercle des cinq familles ? Et non !! Attendez… ce sont les cinq conseillers communaux de Val-de-Travers. Frédéric Mairy, Yves Fatton, Eric Sivignon, Christophe Calame et Benoît Simon-Vermot sont tout sourires dehors. « Bienvenue à tous ! Merci d’avoir répondu à notre invitation. Les derniers mois ont été intenses, n’est-ce pas ? Eh bien rassurez-vous, tout est sous contrôle. Il s’agissait simplement d’une campagne de promotion du Vallon, grandeur nature. Il n’y a aucune organisation criminelle, héréditaire des ‹ Green Scorpions › dans notre région. Et le cristal émeraude trouvé à Buttes vient de la bijouterie Mordasini, pas de leur trésor perdu. » La stupéfaction est générale mais le spectacle final a été tellement réussi que la foule applaudit malgré tout cette initiative.
Dans les murs du Courrier, une certitude subsiste…
Dans les heures qui suivent, chacun rentre chez lui, l’esprit chamboulé mais serein. Il est minuit passé, toutes les lumières se sont petit à petit éteintes sur le Val-de-Travers. Un halo lumineux scintille encore au Courrier, dans le bâtiment de la Place-d’Armes. Duilio Rota éteint son bureau et passe devant la rédaction.
Kevin Vaucher est là, il griffonne sur une feuille, l’écran de son ordinateur allumé. Il repense à cette affaire du diamant vert et à cet épilogue. Il se retourne : « Ça ne colle pas Duilio. Il y a trop d’incohérences avec ce qui s’est passé ces derniers mois pour que tout ce foin ne soit qu’un coup marketing. Je suis certain que le diamant vert et le Cercle existent réellement. » Le directeur s’approche du journaliste. « Je sais bien Kevin. Quelle histoire ! On en parle demain, à tête reposée. N’oublie pas de refermer la porte derrière toi », lance-t-il en lui tapant sur l’épaule avant de s’éloigner. Le journaliste reste seul à son bureau.
Il reprend le dossier depuis le début pour être sûr de ne pas être passé à côté d’un détail déterminant. Il commence par réécouter les audios de toutes les personnes qu’il a interviewées et interrogées sur cette affaire. Il est 00 h 45, quand tout à coup, quelqu’un frappe à la porte…
FIN
Scarlett Moor – Kevin Vaucher