Fusion de Val-de-Travers
Les 180 jours du nom Valtraversin
Le 1er janvier 2009, la commune de Val-de-Travers était officiellement créée. Pour marquer ce quinzième anniversaire, le Courrier du Val-de-Travers hebdo revient, grâce à ses archives et celles de L’Express, sur l’un des sujets sensibles des premiers mois d’existence: le nom des habitants de la commune fusionnée.
Quelle dénomination pour les habitants de la nouvelle commune de Val-de-Travers, officiellement née le 1er janvier 2009 ? C’est la question qui anima le débat régional durant plusieurs mois de cette année-là. Sur sa Une du 21 mars 2009, L’Express annonçait, avec le titre « Vallonniers renommés » la volonté du Conseil communal de soumettre la proposition de Valtraversin, Valtraversine, au Conseil général. L’article intérieur expliquait que pour « donner une légitimité indispensable à [cette] démarche », l’exécutif avait mandaté « l’historien Jean-Pierre Jelmini, afin qu’il établisse une étude sur le sujet ». L’historien natif de Travers y détaillait que sa réflexion s’appuyait sur l’histoire, l’onomastique et la tradition et y indiquait que le terme de Vallonnier était « beaucoup trop général » et qu’il ne signifiait « pas grand-chose » hors du canton.
Enfin, Jean-Pierre Jelmini avançait que le toponyme Val-de-Travers s’était toujours « exprimé par une locution latine ou un vocable local combinant ‹ val› et ‹ traversus › », avant de désigner sa proposition privilégiée de Valtraversin. Le débat était lancé, puisque le 28 mars, un article du quotidien cantonal s’intitulait : « Le nom de Valtraversin, loin de faire l’unanimité ». La journaliste Fanny Noghero y relatait que l’appellation choisie était loin de convaincre l’ensemble des élus de l’époque. Élément insolite, à la suite de l’article le quotidien soumettait un sondage intitulé : les habitants de Val-de-Travers doivent-ils s’appeler les Valtraversins. Le résultat tombait le 31 mars, 29% de oui contre 71% de non. Des commentaires savoureux de lecteurs étaient même relayés par L’Express, comme celui d’un lecteur de Crissier : « Pourquoi pas les Travelots pendant qu’on y est ! ».
Nom qui divise
Le projet de dénomination du Conseil communal qui disait dans son rapport s’être très tôt « préoccupé du nom à donner aux habitants de la commune de Val-de-Travers », fut finalement accepté le 30 mars 2009 par le Conseil général par 23 voix. « Les citoyens de Val-de-Travers sont des Valtraversins », titrait en Une le Courrier du Val-de-Travers hebdo dans son édition du 2 avril. On pouvait y lire que « le sujet a attiré une petite foule d’auditeurs au collège butteran ». Dans son édition du 1er avril, L’Express titrait, quant à lui : « Valtraversin passe, un référendum menace ». L’article y relatait une séance où « toutes les velléités de compromis auront été vaines » et notamment celle de l’ancien conseiller général socialiste Jacques Hainard qui avait proposé « d’adoucir le terme au féminin en proposant l’orthographe Valtraversain, Valtraversaine ».
« En revanche, la proposition PLR et PS visant à faire courir un délai référendaire pour laisser une porte ouverte à la population a passé la rampe […] », poursuivait l’article. Une possibilité de référendum saisie rapidement puisque le Courrier du Val-de-Travers hebdo annonçait dans son édition du 16 avril 2009, « Des Valtraversins se rebiffent » en indiquant que l’appellation ne faisait « de loin pas l’unanimité » et faisait « jaser dans les chaumières ». L’article de Claire-Lise Frossard expliquait que les initiateurs de la démarche, Willy Bovet, Sabine et Robin Erb, avaient jusqu’au 13 mai pour récolter 840 signatures. « Et ça semble bien parti ! », concluait l’article. Un extrait d’une chronique dans L’Express du 14 avril du journaliste Michel Merz peut résumer l’état d’esprit face au nom choisi : « […] un autogoal marqué par les élus de la nouvelle commune unique, le sobriquet passe aussi mal qu’une absinthe frelatée ». D’ailleurs, le 23 avril, un article de L’Express informait qu’un groupe Facebook opposé à la dénomination avait été créé et avec succès.
Plébiscite du non
Le 12 mai 2009, L’Express annonçait en page 11, « Plus de 2400 signatures récoltées contre le nom Valtraversin » et, le 3 juin, que le scrutin se tiendrait le 27 septembre. Malgré un sujet hautement sensible, le vote à venir n’a point enflammé les esprits. Pour preuve, l’unique courrier de lecteur, très neutre, reçu par le Courrier du Val-de-Travers hebdo durant cette période. Dans un article du 25 septembre, intitulé « Le scrutin ne mobilise pas », la correspondante de L’Express indiquait un taux de vote par correspondance, à trois jours du scrutin, de 30%, en supputant que ceci pouvait résulter de la décision tant des autorités que des référendaires de ne pas faire campagne. Néanmoins, elle osait cette interrogation : « Ou alors, le sujet est tellement brûlant que les habitants […] préfèrent se déplacer en personne dimanche […] ? ».
Le résultat, nous le connaissons : 40% de votants disaient à 74% non à l’appellation. Le Courrier du Val-de-Travers hebdo du 1er octobre sous-titrait « Exit Valtraversin » et n’hésitait pas écrire « comme on dit, il n’y a pas eu photo ! ». Dans l’édition du 28 septembre 2009, le journaliste de L’Express, Adrien Juvet, indiquait que c’était « sans surprise que le Conseil communal a pris acte du choix des habitants de Val-de-Travers » et citait le chancelier de l’époque Alexis Boillat: « on s’attendait clairement à un non », ainsi que le conseiller communal Pierre-Alain Rumley, « nous irons de l’avant, même sans nom à donner aux habitants ». Le journaliste de L’Express notait enfin que « le Conseil communal prévoit, sur ce dossier, de ne rien faire », avant de conclure sur les propos de l’ancien conseiller communal : « Nous sommes tous des Vallonniers ».
Gabriel Risold