Lettre ouverte
Noiraigue comme dans l’temps !
C’est Noiraigue dans l’temps !
J’entends ma mère qui parle sur son petit balcon.
Qu’est-ce que tu dis ?
C’est Noiraigue dans l’temps, t’entends pas ce silence ?
En effet « j’entends » et pour rajouter une couche à cet oxymore je dirais même que ce silence est…assourdissant. Aucun bruit de circulation de véhicules étrangers au village, pas de beuglements de touristes descendant en flots des trains dès sept heures du matin. On boit notre café au balcon comme dans l’temps, un vrai bonheur.
Un brin de nostalgie m’envahirait presque en ce magnifique dimanche ensoleillé de Pâques. Le risque de penser que c’était mieux avant est aussi contagieux que ce virus machin-chose 19 est tout aussi mortifère à certains égards.
C’est vrai, on voudrait bien garder notre tranquillité de petit village de vallée et ne pas devoir subir cet envahissement qui d’année en année s’amplifie, donnant un air de parc d’attraction. Un Néraouiland en devenir.
Aujourd’hui c’est l’Ascension, il fait beau et chaud comme à Pâques mais on ne boit plus le café sur le balcon, c’est fini maman le « Noiraigue comme dans l’temps. »
On a tout perdu, on va assécher le marais pour en faire des parkings de supermarchés jusqu’à Travers, dézoner jusqu’à Buttes pour l’implantation d’usines le long de l’Areuse, bétonner et recouvrir cette dernière pour en faire un aéroport, planter des éoliennes des deux côtés de la vallée du Creux du Van jusqu’au Chasseron. Finissons-en une fois pour toutes avec cette vallée de réfractaires à l’avancée du progrès.
Nous pouvons faire du Val-de-Travers un exemple de développement touristique responsable, alliant nouvelles technologies et savoir-faire local. Nos commerçants locaux l’on bien compris et la résistance s’organise. Bravo à eux !
Remercions ici la police et les agents de sécurité publique qui ont fait un excellent job à Noiraigue pour la période de Pâques en contrôlant strictement les contrevenants. Au contraire de l’Ascension qui plus par souci de « doigté » que par « bon sens » aucune amende n’a été délivrée.
L’afflux de véhicules à Noiraigue est exponentiel depuis une dizaine d’années et durant tout ce temps le seul œuf qui a été pondu c’est d’acheter un bout de champ pour vite le terrasser en un parking et instaurer la zone bleue avec gratuité pour résidents, ce qui est la moindre des choses. Le pas suivant serait donc d’acheter la parcelle adjacente et rebelote d’année en année jusqu’au bas de la Clusette ?
Voulons-nous décider et gérer nous-mêmes la manne financière touristique de notre vallée de façon responsable et soucieuse de l’avenir ou voulons-nous continuer la politique des petits pas ?
Creux du Van et gorges de l’Areuse doivent devenir un parc national suisse avec les restrictions et contrôles qui s’imposent, des limitations de transit des véhicules, des parcours de marche délimités, une infrastructure commerciale et didactique, des toilettes, une taxe de visite touristique, la gratuité pour les groupes scolaires, d’études ou de personnes en situation de handicap, etc.
La crête qui s’étend jusqu’au Chasseron devient dès lors attractive et, tout en gardant les particularités paysannes et restaurations de montagne, on réglemente. Cela va avoir pour conséquence une augmentation des véhicules à parquer pour le Val-de-Travers, ce qui est déjà le cas, et une étude devra être lancée pour la localisation et construction de parkings ne dénaturant pas l’environnement (souterrains ? adossé aux pentes et recouverts ?).
Une étude sérieuse sur les énergies alternatives excluant toute spéculation de groupes industriels serait de trop ? Un vrai défi ! Ne nous refusons pas de penser au meilleur.
Mirko Monnet, Noiraigue