Patrimoine MABS :
Totem mémoriel d’un produit et d’une région
Une vingtaine de personnes étaient présentes, samedi dernier à la Maison de lʼabsinthe à Môtiers, pour lʼinauguration, dans le cadre de la nuit des musées, du « totem » des archives de la RTS, une première en Suisse romande. Un terminal audiovisuel qui regroupe plus de vingt heures dʼarchives concernant lʼabsinthe depuis 1941 à nos jours, et qui, au-delà de relater lʼhistoire d’un produit, retrace celle contemporaine dʼune région.
« Émotion et fierté », telles étaient les premières impressions de Yann Klauser, samedi soir, à l’heure d’inaugurer la borne « totem » des archives de la RTS de la Maison de l’absinthe (MABS). Le directeur de la MABS était « ravi » dʼaccueillir une « crème régionale » dʼune vingtaine dʼamoureux du Val-de-Travers et dʼamateurs dʼabsinthe, pour cette première pour un musée en Suisse romande. En effet, il sʼagissait de la première installation de ce terminal audiovisuel par la RTS qui permet de mettre en valeur le patrimoine radiophonique et télévisuel romand. Celui placé à la MABS recueille 91 documents dʼarchives, dont 75 vidéo et 16 audio, concernant lʼabsinthe, sʼétalant de 1941 à aujourdʼhui et répartis en différentes thématiques, comme « divin nectar », « temps forts », « prohibition » ou « commercialisation ». Un ensemble de documents qui représente environ 20 heures dʼarchives.
La genèse de ce projet de la MABS débute en 2019 lors dʼune projection publique organisée par les archives de la RTS à Fleurier, lorsque Yann Klauser apprend par les collaborateurs de la télévision romande que de nombreux documents liés à lʼabsinthe existent. « Ceci nʼest pas tombé dans lʼoreille dʼun sourd », reconnaît le directeur de la MABS qui prend alors contact avec le service des archives dans lʼidée dʼun projet visant à les réunir. Après deux ans de travail de recherche, aussi impacté par la pandémie, la MABS a pu ainsi inaugurer, en « présentiel », cette borne qui compile des extraits de reportages et dʼémissions, et qui relate lʼhistoire du produit phare du Val-de-Travers. Des témoignages et des traces désormais préservées pour les générations futures.
Histoire dʼune région également
Ce corpus dʼarchives contient de nombreuses « perles », comme les personnes présentes ont pu sʼen apercevoir lors de la projection de quelques séquences. Des reportages, encore en noir et blanc, où les journalistes de la TSR interrogent les habitants du Val-de-Travers sur les clandestins et la prohibition dʼalors, lʼentretien avec un fabricant dʼalambics qui dit que ses meilleurs clients sont ceux ayant été saisis, ou la « descente » de la régie fédérale des alcools chez Roger Vaucher-Bähler à Fleurier, « le coup des trois cheminées », sʼest écrié un invité, ont notamment fait rire les spectateurs. Dʼautant plus que les intervenants de ces archives étaient connus de lʼassemblée ou que des personnes se revoyaient à lʼimage. Comme ce fut le cas pour Pierre-André Delachaux, présent, et qui en historien du Val-de-Travers a été souvent interrogé par la télévision. Plus que le produit interdit, ce sont les gens du Vallon qui sont mis en valeur.
Du visionnage de ces quelques extraits, il en ressort quʼau-delà de faire lʼhistoire de lʼabsinthe, cʼest une partie de celle du 20e siècle au Val-de-Travers qui est retracée. Tant chaque archive présentée offre à voir lʼidentité dʼune vallée marquée par cette période dʼinterdiction de lʼabsinthe, de sa production clandestine, et où lʼon aime le goût du secret et de lʼinterdit. « Lʼidentité du Val-de-Travers passe en grande partie par ce produit », estime Yann Klauser, très heureux de proposer un nouveau support didactique qui sʼinscrit dans le développement continu de la MABS. Un « totem » qui permettra aux visiteurs de découvrir, voire de redécouvrir, 80 ans dʼarchives audiovisuelles liées à lʼabsinthe. Et pourquoi pas à des visiteurs vallonniers, car ces documents, dont les invités nʼont pu voir quʼune infime partie, relatent leur histoire et une période de vie de leur collectivité.
Gabriel Risold