Quand déboule la question des transports
La question des transports publics est déjà bien prégnante dans le canton de Neuchâtel. Globalement, on ne peut pas renier le fait que nous avons un train de retard par rapport à d’autres grands centres urbains, notamment alémaniques. Le récent éboulement survenu sur la route reliant Fleurier aux Verrières a fait déferler une autre interrogation. Comment mieux intégrer les « petits villages » au réseau ? Plusieurs habitants nous ont contactés ces dernières semaines pour faire part de problèmes récurrents dans l’agencement des correspondances, dans leur cadencement ainsi que dans les horaires de desserte. Analyse de la situation.
Le Val-de-Travers, et spécialement les zones isolées comme La Côte-aux-Fées, Les Bayards ou Les Verrières, sont parmi les derniers wagons les mieux desservis par les transports en commun neuchâtelois.
On nous parle de progrès année après année mais le fait de stagner sur quelque chose qui n’est pas optimal n’a rien de progrès en soi. Les transports publics peuvent parler d’améliorations pour les grandes villes comme La Chaux-de-Fonds ou Neuchâtel, là d’accord ! Mais pour les campagnes, franchement…
En quelques mots, le Verrisan Sylvain Moser a résumé l’exaspération qui a gagné bon nombre d’habitants dépendant des transports en commun pour se déplacer au quotidien. Comme les heures de travail s’étendent toujours plus sur la journée et qu’il n’est pas rare de travailler jusqu’en fin de journée, certains réclament des solutions plus directes et plus fréquentes pour rentrer chez eux, au moins jusqu’à 20 heures.
La voiture, une solution par défaut
J’aimerais rappeler qu’il y a davantage de citoyens en campagne qu’en ville sur l’ensemble de notre canton. Or, rentrer chez soi devient particulièrement long voire impossible à partir de 19 h. Cela oblige une partie de la population à se déplacer en voiture, ce qui engorge les villes, multiplie les risques d’accidents et entraîne de la pollution évitable.
Le constat est clair et assumé. Dans les faits, cela se traduit par des correspondances inadaptées entre trains et bus ou encore des retards réguliers qui entraînent des délais d’attente rallongés d’une heure, notamment en hiver.
Imaginez un Verrisan qui va à Neuchâtel, à Bienne ou à Lausanne chaque semaine. Celui-ci a parfois deux ou trois minutes pour prendre une correspondance. Et s’il la manque, avec combien de retard pensez-vous qu’il arrivera à son rendez-vous ? Tout ça sans parler des week-ends et des jours fériés où ceux qui travaillent sont quasiment livrés à eux-mêmes.
Prendre un bus doit devenir un réflexe
Après l’éboulement sur la route entre Fleurier et les Verrières, la mise en place de transports spéciaux a conduit à quelques améliorations bienvenues mais passagères.
Cela ne réglait de loin pas tout mais ça a montré qu’il était possible d’améliorer les choses avec un peu de bonne volonté. On ne demande pas grand-chose, une liaison supplémentaire le matin entre La Côte-aux-Fées et Buttes, une autre le soir entre Le Locle et La Brévine à partir de 20 h. C’est ce type d’améliorations que nous attendons dans les petits villages. On pourrait aussi imaginer faire circuler les cars postaux jusqu’aux Verrières lorsque l’horaire le permet sur la ligne La Brévine-Les Bayards. Ce qui permettrait de relier Le Locle deux fois plus vite.
Qu’en est-il de la faisabilité de ces quelques demandes dont la liste complète a été transmise à l’office cantonal des transports ?
C’est réalisable en jouant sur le temps de pause des chauffeurs par exemple. Ils patientent parfois une demi-heure dans le vide, c’est incompréhensible. On ne demande pas davantage de moyens mais qu’ils soient utilisés plus efficacement pour densifier les possibilités. Les cantons du Jura et de Vaud ont compris les enjeux cruciaux que représentent des transports efficients dans l’évolution des mentalités et des modes de déplacement.
En gros, prendre un bus ou un train au lieu de la voiture doit devenir un réflexe.
Les travaux de la Clusette, un cas pratique ?
Et pour qu’il puisse le devenir, on ne doit pas se poser la question de savoir s’il faudra attendre une heure pour être véhiculé ou s’il faudra abréger la fin du film au cinéma pour pouvoir rentrer dans les temps. De même, lorsque des travaux comme ceux qui seront engagés prochainement sur le tunnel de la Clusette congestionnent le trafic, il pourrait être intéressant pour les transports publics d’ajuster leur offre.
Si les gens ne viennent pas aux transports publics, c’est aux transports publics d’aller à eux. C’est l’occasion parfaite de le faire en introduisant un cadencement à la demi-heure dès la première course et jusqu’à 21 h par exemple. C’est à ce prix que de nouveaux clients pourront être attirés et que les autres seront fidélisés.
Il faut un peu de bon sens et de flexibilité pour être connecté aux besoins des gens.
Prenez encore le cas de la course reliant Fleurier aux Verrières (ou carrément jusqu’à Pontarlier). Il y a un doublement de cette course à 11 h 08 en semaine car certains villages ne sont pas desservis. Ce qui est coûteux et parfaitement inutile. Une seule navette s’arrêtant partout à l’aller comme au retour ferait très bien le travail. Ce qui permettrait de supprimer le petit bus desservant Saint-Sulpice et Les Bayards. Pourquoi ne pas essayer ces ajustements sur une période de trois ans et voir quels sont les retours des utilisateurs concernés ?
De même, il serait pertinent de demander aux non-utilisateurs des transports publics pourquoi ils ne les prennent pas et quelle part explique cet état de fait par les incohérences soulignées ci-dessus. Ou faut-il un nouvel éboulement pour remettre ces questions sur la table ?
Kevin Vaucher