Commune de Val-de-Travers
Un concours comme offensive médiatique
Depuis sa fusion, Val-de-Travers réfléchit à son attractivité. Après un changement d’identité visuelle, il y quelque mois, la commune présentait ce jeudi matin, un deuxième volet de son plan de promotion démographique et économique. Il vise un public-cible, les 55-65 ans, et prend la forme d’un concours pour gagner six séjours sur deux week-ends au Val-de-Travers. Opération dont les résultats seront peu mesurables, mais qui permet à la commune de communiquer et de faire parler d’elle.
Gagner un séjour de trois jours au Val-de-Travers et expérimenter la vie au Vallon et dans tous ces aspects, terroir, culture, sport et nature : voici la première offensive médiatique de Val-de-Travers après avoir totalement revisité son identité visuelle au mois de février. Concrètement, la commune mettra au concours six séjours lors de deux week-ends « spéciaux », durant lesquels les heureux bénéficiaires du tirage au sort seront guidés, s’ils le désirent, par différents citoyens « lambda » qui en seront ambassadeurs du Vallon.
Nous avons déjà contacté des citoyens et ils se sont montrés heureux de faire vivre la vie locale,
explique Benoît Simon-Vermot, président du Conseil communal, en ajoutant que les activités propres à différentes thématiques proposées aux gagnants ont été également listées. Cette initiative promotionnelle, qui peut sembler hétéroclite, sera relayée par un large déploiement médiatique au niveau romand, via différents canaux, comme les réseaux sociaux, la presse ou l’envoi de courrier personnalisé.
L’objectif avoué par le Conseil communal de la démarche, infléchir la vision qui confine souvent la région du Val-de-Travers à son attractivité touristique.
Notre image est bonne en Suisse romande, en Suisse allemande ou à l’étranger, notre identité est reconnue, mais trop souvent pour le tourisme et non comme un lieu de vie,
commente Benoît Simon-Vermot. Le président de l’exécutif communal estime que ce concours permettra surtout de faire parler de la région et de mettre en avant toutes les prestations et services présents. L’opération est évaluée à environ 60’000 francs, une mesure financée par un crédit voté en 2012 et jugé encore modeste par le président de l’exécutif en comparaison aux sommes versées par certaines communes de montagne pour chaque nouvelle domiciliation. En exemple, en 2017, la commune valaisanne d’Albinen proposait jusqu’à 70’000 francs à chaque famille s’y installant pour au moins dix ans et investissant dans un projet immobilier au minimum de 200’000 francs.
Et la nouvelle offensive de Val-de-Travers cible en particulier un certain public : les 55-65 ans. Une classe d’âge que la commune avait, selon ses propres dires, quelque peu délaissée qui, selon son communiqué de presse, représente 15% de la population helvétique.
Population « durable » et investie
Depuis plusieurs années, la commune de Val-de-Travers reconnaît un tassement de sa population à l’instar du Canton et les autorités communales ont défini leurs objectifs principaux :
Ancrer durablement les citoyens actuels, attirer de nouveaux habitants et favoriser le développement économique.
Si Val-de-Travers a déjà grandement investi, à hauteur de plus de 13 millions de francs pour des infrastructures scolaires et parascolaires, pour se positionner comme « le terrain de jeu idéal » des familles, la commune souhaite désormais attirer d’autres tranches d’âge et de personnes et par exemple pour y vivre « une retraite active », comme celle de 55 à 65 ans. Une classe susceptible de « s’installer durablement » après « une vie professionnelle souvent bien remplie ».
Cette catégorie désire s’établir pour longtemps et s’investit dans la vie locale,
détaille Benoît Simon-Vermot.
Mais elle n’a pas besoin de prestations particulières,
poursuit-il, en soulignant que les services et le cadre de vie cherchés par ces personnes existent déjà au Val-de-Travers.
Infrastructures sportives, commerces locaux, transports, dynamisme associatif et culturel, qualité de vie, tant d’éléments qui correspondent aux « avantages d’une ville » sans en avoir certains inconvénients que le Conseil communal veut désormais « faire savoir urbi et orbi », et notamment à une population qui est en réflexion sur son avant-dernière étape de vie. Néanmoins, les personnes du troisième âge deviendront de facto un jour ceux du quatrième ou du cinquième, ainsi n’y a-t-il pas la crainte de transformer Val-de-Travers en cité de retraité comme certaines villes aux états-Unis, uniquement dédiées à ceux-ci ?
Je ne pense pas,
estime Benoît Simon-Vermot.
La commune doit trouver un équilibre démographique, entre un pôle « familles », un pôle « actifs », un pôle « retraités » et un pôle « jeunes adultes très mobiles,
précise-t-il, en soulignant que les 55-65 ans restent dynamiques et qu’actuellement des familles s’installent également à Val-de-Travers.
Mesures au quotidien et réflexions futures
Hormis, cette offre de concours novatrice et étonnante, l’exécutif communal ne veut pas oublier toutes les mesures qui sont mises en œuvre au quotidien pour l’attractivité de Val-de-Travers et ancrer sa population.
Nous faisons également beaucoup pour nos aînés,
relève Benoît Simon-Vermot, en insistant sur nombre de réflexions en cours au sein des autorités afin de poursuivre cette campagne de charme. D’ailleurs, il peut apparaître comme étonnant que cette offensive se limite à la Suisse romande ? Le président de Commune nous répond que ceci découle d’une première action, si celle-ci devait être un succès, la possibilité de l’élargir par la suite, à la Suisse allemande, voire aux régions frontalières, existe.
Peut-être que passer trois heures en voiture durant la journée, n’est pas idéal,
ose-t-il avancer. Quoi qu’il en soit, si l’intérêt de ce concours devait être concluant, le conseiller communal imagine déjà une relance lors d’une autre saison, comme à l’automne par exemple, et ce toujours dans le but de capter l’intérêt de la population et pas seulement neuchâteloise.
Capter l’intérêt et attirer : objectifs compréhensibles et nécessaires, mais le parc immobilier communal permet-il la venue de nouveaux habitants et les possibilités d’établissements sur le territoire communal existent-elles ? Le président de l’exécutif de Val-de-Travers nous répond par l’affirmative. Nombre de projets de développement immobilier sont en cours, tant privés que communaux, avec parfois la possibilité d’encadrement, et le plan d’aménagement, en cours d’élaboration prévoit de permettre un développement immobilier et démographique de qualité.
Notre parc immobilier évolue dans cette direction,
estime Benoît Simon-Vermot, en citant l’exemple des quartiers de la Binrée à Fleurier ou de Plaine Fin à Môtiers. Le conseiller communal est conscient que les effets de cette campagne de promotion « à court terme » seront ardus à mesurer, mais des actions futures sont d’ores et déjà prévues durant le second semestre 2022 et l’année prochaine. Toutefois, derrière cette émulation optimiste et volontaire, demeure une interrogation, comment attirer au Val-de-Travers des personnes n’ayant aucun lien personnel, familial ou filial avec cette région, où le sentiment identitaire est fort ? Déconstruire son image uniquement touristique peut certainement y participer, mais cela sera-t-il suffisant ? Une partie du pragmatisme des autorités communales tient dans le fait qu’elles sont conscientes de cette question et que d’autres mesures de développement, non pas seulement démographiques mais économiques, devront être entreprises.
Gabriel Risold