Une petite prière au grand inconnu
Tu sais que les armes n’ont jamais résolu aucun problème, mais qu’elles nous en ont toujours imposé d’autres. Nous savons que leur production rapporte beaucoup d’argent aux producteurs et aux actionnaires, et que la littérature et le cinéma mettant en scène des héros et des héroïnes armés sont de grands succès et remplissent les caisses ; mais nous savons aussi que ces affaires à morale douteuse creusent encore plus le fossé entre riches et pauvres, et que ce matériel à carnage coûteux tue et détruit. Bref, nous aimerions tous les deux que ces armes qui volent, qui roulent et qui crachent le feu disparaissent de la terre et de l’air. Et si on enlevait à toutes les armes leurs combustibles ? Ce serait un début de solution et en plus rendrait les magnats du pétrole plus modestes.
Je te vénérerais encore plus si tu pouvais résoudre un autre problème : notre société de consommation utilise une quantité énorme d’énergie. Cela entraîne une plus grande pauvreté, car il est impossible que tous sur cette terre puissent vivre ainsi. En plus nous détruisons la nature avec nos mines pour les matières premières et autres catastrophes ; nous dévastons nos belles régions avec des monstres rotatifs seulement pour du combustible soi-disant renouvelable, combustible qui doit empêcher que notre prospérité ne s’effondre, pour que les autoroutes et les aérodromes ne se vident pas, pour que nous continuions à voyager pour échapper à notre ennui et à notre environnement détruit.
Cher grand inconnu, nous nous comprenons, pourtant nous savons tous les deux que cela ne peut pas continuer ainsi, que nous devrions travailler pour une cohabitation modeste et humainement compatible, pour notre bien-être et celui des autres : ce n’est pas avec des revolvers, des drônes et des multinationales d’énergie qu’on y arrivera. Nous savons aussi que ni la technologie ni la digitalisation n’épargneront aux êtres humains cette tâche difficile mais nécessaire.
Grand inconnu, jusqu’à présent tu n’as pas écouté mes prières, et maintenant, tu m’écoutes ? On dit que tu sais ce qu’il faut pour faire le meilleur des mondes…
Heinz Salvisberg, Buttes