Vie politique
L’au revoir du « dernier des Mohicans » de Val-de-Travers
Il y a deux semaines, Yves Fatton quittait le Conseil communal de Val-de-Travers après quatre législatures passées à l’exécutif. Retour sur seize ans et plus de politique régionale, avec un radical humaniste qui ne pensait pas rester.
Comme l’a qualifié son camarade de parti, Florian Dreyer, lors de la dernière séance de la législature du Conseil général de Val-de-Travers, il était le « dernier des Mohicans » de la commune. Après quatre mandats, Yves Fatton a quitté son poste de conseiller communal responsable du dicastère des infrastructures (DI) le 28 juin dernier. « Ces dernières semaines ont été difficiles car il a fallu dire au revoir aux membres de mes équipes », relate Yves Fatton. Un personnel « formidable », ses « bras droits » comme il le dit, qui l’ont épaulé et soutenu tout au long des seize années passées à l’exécutif.
Premier président de la commune fusionnée officiellement née le 1er janvier 2009, le Butteran ne pensait pas siéger aussi longtemps au Conseil communal. « J’ai continué car j’ai aimé ce job », explique-t-il en soulignant aussi sa motivation à poursuivre de beaux projets pour la commune. Les résultats des urnes à chaque élection, où il a toujours figuré parmi les mieux élus, ont été le baromètre de légitimité. Le désormais ex-conseiller communal avoue n’avoir eu que du plaisir durant seize années, mais autant à également arrêter. « C’est le bon moment, après quatre législatures et à bientôt soixante ans », estime Yves Fatton, en notant avoir toujours souhaité ne pas quitter son poste en cours de mandat. « J’ai confiance en les générations montantes », ajoute celui qui est entré en politique comme conseiller général à Buttes, à 18 ans, sous les couleurs du Parti radical.
Aimer aider les gens
Le début du parcours politique du Butteran de naissance et de vie remonte à presque quarante ans et tient un peu de l’évidence, tant la chose publique est chère à son cœur. D’abord conseiller général de sa commune, puis à partir de 1996 conseiller communal jusqu’en 2005, avant de devenir membre du premier exécutif de Val-de-Travers en 2008. Également de 2006 à 2009, il reprend le siège de Laurent Favre et siège au Grand Conseil neuchâtelois. « Mon papa faisait déjà de la politique », note l’ancien élu qui a très vite et toujours eu l’envie de modeler sa région, de « l’étoffer » pour y vivre agréablement. « Faire avancer les choses, amener un plus dans le débat et trouver des consensus », résume-t-il pour qualifier sa vision de la politique.
Le popiste Philippe Vaucher l’a décrit comme un « radical humaniste », il accepte avec plaisir le qualificatif. « C’est le fondement de la Suisse, apporter quelque chose à tout le monde », sourit Yves Fatton, soulignant qu’il peut se positionner à droite, parfois à gauche, mais principalement au centre, là où les solutions peuvent être trouvées. « J’ai toujours aimé aider les gens. Je ne conçois pas ma vie avec l’idée de laisser quelqu’un sur le bord de la route », précise-t-il. Même s’il a eu des contradicteurs politiques durant ces quatre mandats à l’exécutif, il retient surtout le plaisir de la collaboration en commission avec les membres du législatif, dont certains sont devenus des amis. Si lui-même estime sa parole « cash » et « sans ambiguïté »,
la classe politique du Val-de-Travers lui reconnaît une capacité à dépasser rapidement le conflit. « Le lendemain, il est oublié », relève l’ex-chef du DI.
Un des pères fondateurs
Partisan dès le début de la fusion des communes du Val-de-Travers, notamment en étant membre de la commission technique à l’étude de celle-ci, Yves Fatton quitte l’exécutif avec le sentiment du devoir accompli. D’ailleurs, il avait démissionné en 2005 du Conseil communal de Buttes car sa majorité n’était pas favorable à une fusion. « J’ai toujours été convaincu de la fusion, être reconnu au niveau du canton et mettre les capacités en commun pour développer harmonieusement notre région », se rappelle-t-il, en notant un seul regret, celui du refus des Verrières et de La Côte-aux-Fées.
Pour le futur, le Butteran estime que Val-de-Travers est sur le « bon chemin » et que les bases sont désormais présentes et solides. Selon l’ex-conseiller communal, un des défis sera la stabilisation des finances, mais il souhaite surtout au nouvel exécutif « d’avoir des projets et des rêves » et de toujours améliorer « la belle machine » qu’est la commune, dit-il en mécanicien. L’unique changement dans la politique communale constaté par Yves Fatton, depuis seize ans, est une certaine idéologisation des débats, où des conceptions et idées plus larges prennent toujours plus d’importance. « Cela pourrait devenir compliqué », note l’ex-élu en précisant que la politique communale doit se centrer sur elle-même.
Des débats auxquels il ne prendra plus part dorénavant. Pour Yves Fatton, l’horizon est fait des quatre « mois de pause » avec un voyage au nord de l’Europe avec son épouse, soutien indéfectible comme il le souligne, avant de reprendre du service comme inspecteur au sein du SCAN. Et le Butteran s’est mis à disposition de son parti pour les élections cantonales de l’année prochaine. Dernier tour de piste avant une révérence politique méritée ? À Val-de-Travers, cela est désormais chose faite et avec ce qui qualifie peut-être le mieux Yves Fatton : sérieux et humilité.
Gabriel Risold